Pourquoi mon enfant pleure-t-il tous les matins et/ou tous les soirs à la crèche ?

· Pédagogie,Vie de la crèche

Chaque matin, vous emmenez votre enfant à la crèche et chaque matin, il se colle à vous, il se cache derrière vos jambes ou vous agrippe le pull au moment d’aller dans les bras de la professionnelle. Pourtant, le soir, il fait semblant de ne pas vous voir et va même jusqu’à se cacher à l’autre bout de la section. Légitiment, un sentiment de culpabilité peut naître en vous. Parfois même un peu de tristesse à l’idée de laisser votre enfant se calmer sans vous le matin. Néanmoins, pouvez-vous l’aider à mieux appréhender cette séparation et donc à mieux gérer son attachement naturellement si fort à vous ?

Les parents comme figure d’attachement primaire

En premier lieu, je voudrais évoquer la notion du lien d'attachement chez l'enfant car c’est ce dont il est question ici.

La figure d'attachement primaire de l'enfant, choisie par celui-ci au tout début de sa vie, est la personne qui s'occupe le plus souvent de lui et celle qui pour lui sait répondre à ses besoins.

Le lien d'attachement relie l'enfant à l'un de ses parents, puis aux 2 et ensuite au groupe d'adultes qui s'occupent le plus régulièrement de lui (grands-parents, frères et sœurs, professionnels) : nous parlons ici de figures d’attachement secondaires. Les parents restent majoritairement la figure d'attachement primaire de l'enfant. C'est donc en leur présence seulement que ce petit être osera exprimer tout ce qu'il ressent.

La difficulté de gérer ses émotions avant 3 ans

Les émotions qu'un enfant peut ressentir lors de sa journée à la crèche sont souvent canalisées par ce dernier et resurgissent en fin de journée lors de l'arrivée du parent. Les émotions de l'enfant sont souvent en corrélation avec son humeur au réveil.

Le matin, un enfant aura plus ou moins envie d'aller à la crèche. Cela dépend de la nuit qu'il vient de passer, des événements entre son réveil et le départ pour la crèche, etc. C'est exactement pareil pour nous adultes. Certains matins, nous avons plus ou moins envie d’aller travailler : petit exemple pour illustrer cela, un matin, vous vous rendez compte que vous avez oublié d’acheter du café, forcément, la journée commence moins bien. Si en plus, votre conjoint.e devait acheter ce café, la journée peut très mal démarrer. Pour un enfant, le simple fait de ne pas mettre le bonnet qu’il souhaitait mettre peut avoir un impact sur son arrivée à la crèche. Ce que nous savons faire en tant qu'adulte, et que votre enfant apprendra à faire plus tard en grandissant, c'est raisonner : après tout, nous prendrons ce café au bureau, ce sera très bien.

Un enfant peut arriver en pleurant le lundi, en sautant de joie le mardi, en colère le mercredi… C’est ce qu'il ressentira sur le moment qui fera que la séparation se passera plus ou moins facilement.

D’autre part, il n'a également pas envie de vous voir partir au travail, tout comme vous n'avez pas envie de le laisser à la crèche mais encore une fois, nous avons appris à raisonner, nous savons qu'il est obligatoire d'aller travailler. Or, un enfant de 3 ans n’en a aucune idée.

Comprendre les émotions de son enfant est un travail de tous les instants

Lors de sa journée en crèche, au cours des jeux, pendant les activités, la motricité et les interactions sociales avec ses camarades, il y a plein de connexions qui se font dans son cerveau. Ces connexions sont très importantes car, pendant qu'il joue, se dispute, crie, rigole avec les autres enfants, il se créé petit à petit un caractère, une personnalité qui lui est propre. Il apprend à s'individualiser en observant les autres (fascinant non?). Il va également, grâce à ces fameuses connexions neuronales, apprendre à ressentir des choses. Et ces choses qu'il éprouve et qu’il ne sait pas encore nommer, ce sont les émotions. Ces émotions, qui, si nous ne faisons pas attention, peuvent très vite passer inaperçues. Les émotions telles que la peur, la colère, la tristesse sont plus facilement repérables sur le visage d'un enfant (froncements des sourcils, cries, pleur, etc.).

Lors des transmissions du soir, l'équipe essaie au mieux de vous raconter la journée de votre enfant mais quelques-unes de ces émotions nous auront échappées durant cette journée. L'enfant se fait donc un plaisir le soir de vous raconter comment il a vécu sa journée. Cependant, à son âge, il est difficile de vous dire "trop bonne journée aujourd'hui papa!" ou "j’ai été beaucoup contrarié aujourd’hui maman !". Il a vécu tellement d'émotions durant ces quelques heures qu'en vous voyant (sa figure d'attachement) tout remonte à la surface. Ne sachant comment réagir, l'enfant pourra crier de colère le lundi, pleurer le mardi, courir partout le mercredi… Tout dépendra encore une fois de ce qu'il ressent sur le moment et comment il gère son émotion. Rappelons-nous que son émotion le submerge et que ses réactions dépassent aussi le plus souvent votre enfant.

Etre disponible pour accompagner votre enfant

Si votre enfant a du mal à se séparer de vous le matin ou à vous retrouver le soir, c'est probablement à cause de cette gestion des émotions. Il a besoin d'un peu plus de temps que d'habitude, un peu plus de temps que les autres pour comprendre ce qu'il se passe.

Arriver plus tôt le matin et le soir (quand cela est possible) permettra à l'enfant d'avoir un temps de transition plus long entre la maison et la crèche. Ce temps est bénéfique pour qu'il apprenne à gérer les changements de situations. En revanche, si le parent reste trop longtemps en section, le matin comme le soir (après les transmissions) cela pourrait perturber l'enfant car il pourrait penser que le parent va rester là avec lui. C’est également valable lorsque le parent ne reste pas du tout. Et oui il est difficile de trouver ce temps juste mais faites vous confiance, vous êtes les mieux placés pour savoir ce qui est bon pour votre enfant.

Mais alors que faire pour aider mon enfant ?

Vous pouvez expliquer à votre enfant en chemin le matin le déroulement de la journée et le rassurer en lui disant que vous viendrez le récupérer le soir, ce qui est évident pour vous mais pas pour lui.

Si un matin votre enfant se met à pleurer lorsque vous partez, vous pouvez lui donner son objet transitionnel : s’il a une tétine, son reflex de succion l'apaisera et s’il a un doudou, son odeur l’aidera à se calmer. Vous pouvez également le prendre dans les bras pour un dernier câlin avant de le laisser directement aux bras de la professionnelle présente, elle prendra le relais pour lui expliquer la situation et le rassurer. Si vous avez confiance en vous et en la professionnelle, votre enfant le ressentira et trouvera le réconfort dont il a besoin.

Si cela arrive le soir lors de vos retrouvailles et que votre enfant refuse de partir avec vous, vous pouvez l’aider à finir l’activité qu’il vient de commencer. Il sera fier de vous montrer comment il arrive à faire tout seul. Mais si vous ne pouvez pas rester assez longtemps, vous pouvez lui dire de confier son activité à la professionnelle, elle la mettra de côté pour qu’il puisse finir le lendemain. Quoiqu’il en soit, ne culpabilisez pas, les professionnels sont habitués à ces retrouvailles parfois difficiles et si vous voulez faire semblant de repartir, les professionnels vous suivront dans votre jeu.

Lorsqu’il est assez grand, vous pouvez transformer l’habillage en compétition car tout passe par le jeu à cet âge. Par exemple, en lui disant « celui qui met son manteau le premier a gagné » son attention sera portée sur l’habillage et non sur le départ. S’il est trop petit, vous pouvez demander à la professionnelle un livre, il détournera son attention sur les images du livre pendant que vous l’habillez. Ici encore, l’objet transitionnel est important si l’enfant à du mal à partir.

Ne vous inquiétez pas si, pendant une petite période, la séparation et les retrouvailles se montrent un peu compliquées avec votre enfant. Il apprend à exprimer ce qu’il ressent et se construit un caractère et une personnalité qui feront de lui un adulte comblé.

Mai 2020

Camille Yoka - Animatrice petite enfance chez Paidou