C’est la fête, votre enfant vient de souffler sa toute première bougie. Vous êtes ravis mais une petite voix vous rappelle les remarques entendues ici et là : « Oh, mon fils a marché à un an ! » ou encore « toi, à 10 mois, tu marchais déjà ! ». Pourtant, votre bébé se tient tout juste debout et l’étape de la marche semble encore loin. Alors, forcément, vous vous demandez : fait-il partie des enfants "en retard" ? Et surtout, comment l’aider ?
Avant tout, prenons un moment pour démystifier ces fameuses étapes du développement, et relativiser ces étiquettes d’“enfants précoces” ou “en retard”.
Les stades “sacrés” du développement
Vous avez sûrement déjà entendu parler de ces fameux stades : ceux qui nous disent que de 0 à 6 mois un enfant doit savoir faire une chose et de 6 à 12 mois, une autre.
Dans la petite enfance, ils ont été développés sur bon nombre de sujets par de nombreux spécialistes (infirmiers, médecins, psychologues...) pour mieux comprendre si un enfant se développe “normalement”.
On retrouve des stades de développement pour décrire les étapes de développement des capacités motrices, psychologiques et psycho-affectives des enfants. C’est parfois à cause de ces stades, qui mettent en avant certaines tranches d’âge, que nous entendons « mon enfant à marcher tôt, il se tenait déjà debout à 9 mois ! ».
Ces stades sont utiles pour repérer certains retards et accompagner les enfants qui en ont besoin. Mais ils peuvent aussi créer une pression, chez les parents comme chez les enfants. Car à force de vouloir faire entrer tous les petits dans des cases bien définies, on oublie parfois une chose essentielle : chaque enfant est unique et avance à son propre rythme.
La motricité doit être libre
Un enfant va passer par plusieurs étapes avant de commencer à marcher. Chaque étape prépare la suivante en lui permettant d’acquérir de bons appuis avant de commencer à marcher. Sans évoquer ici de tranches d'âge, je vous parlerai des 5 étapes majeures lors de la progression de la position allongée à la marche active.
Il est important de noter que toutes ces étapes ne sont pas forcément obligatoires pour chaque enfant : certains peuvent en sauter une ou deux, c’est tout à fait normal.
Étape 1 : la découverte du corps
Allongé sur le dos, l’enfant essaie d’attraper ses pieds afin d’être en position fœtale. Cette position lui rappelle sa position dans le ventre de sa mère. C’est le point de départ d’une prise de conscience de son corps et de ses appuis.
Étape 2 : Se retourner et ramper
Petit à petit, l’enfant va se mettre à rouler de gauche à droite pour se retrouver sur le ventre puis commencera à ramper.
Étape 3 : le 4 pattes
En prenant appui sur ses mains et ses genoux, l’enfant tente de se soulever. C’est souvent à ce moment-là qu’il commence le 4 pattes, une étape clé pour renforcer ses bras, ses jambes, mais aussi sa capacité à s’orienter dans l’espace.
Étape 4 : s’assoir tout seul
En musclant ses bras lors du 4 pattes, l’enfant va commencer à pousser plus d’un côté ou de l’autre afin de trouver la position assise. Une étape importante avant le passage à la verticale.
Étape 5 : se redresser et marcher
Une fois la position assise maîtrisée, il essaiera de s'agripper aux meubles ou aux adultes qui sont à ses côtés afin de passer debout et quelques semaines plus tard de se lâcher et de commencer à marcher. C’est le grand moment : ses premiers pas !
Il arrive que certains enfants sautent l’étape de la position assise ou celle du 4 pattes. Ils passent alors de la position horizontale à la position verticale. Dans ces cas-là, ils peuvent mettre un peu plus longtemps avant d’arriver à se tenir debout.
Parfois, quand un enfant pleure beaucoup, nous pensons qu’il en a marre d’être dans une position et nous prenons les devant en le changeant nous-même de position. À ce moment-là, il arrête de pleurer mais a-t-il eu le temps d’aller au bout de son propre effort ?
Myriam David, pédopsychiatre française, disait en 2003 : « Il importe de ne pas le contrarier en faisant intrusion, en exposant par exemple le bébé à des postures qu’il n’a pas encore découvertes et qu’il n’est pas encore prêt à adopter, lui enlevant la joie de découvrir par lui-même et la confiance en ses propres capacités. »
Laissons-lui le temps. Observez-le. Encouragez, sans précipiter. C’est dans ces moments que se construisent non seulement ses muscles… mais aussi sa confiance.
L’environnement : le meilleur ami du développement
Une bonne partie du développement moteur se joue au travers de l’environnement que nous proposons aux enfants. Qu’ils soient dans un parc ou sur un tapis dans le salon, il est indispensable de proposer un espace sécurisé et attrayant. Nous pouvons les aider en proposant des jouets ou objets qui attirent leur attention afin de leur donner envie d’aller explorer. Les enfants ont une curiosité naturelle pour le monde qui les entoure alors autant en profiter.
Bien sûr, pour l’aider indirectement, l’habillage est important : préférez aussi les vêtements souples (T-shirt et legging par exemple) pour faciliter ses mouvements.
L’enfant découvre son environnement au travers de ses 5 sens, il est important de le laisser explorer, notamment avec sa bouche, tant que cela reste en toute sécurité. Son cerveau enregistre les différentes textures, couleurs, odeurs et goûts de cette manière. Chaque expérience sensorielle est un pas de plus dans son développement.
Alors, me direz-vous, que puis-je concrètement proposer à mon enfant ?
Nous pouvons proposer différents jeux pour chacune de ces 5 étapes de développement.
Quand l’enfant est :
- sur le dos : le mettre en body ou du moins sans chaussettes afin qu’il puisse ressentir la surface sur laquelle il est posé. Afin de faciliter le regroupement, nous pouvons jouer avec ses pieds à l’aide d'objets de différentes textures (plume ou balles à picots par exemple). Jouer avec lui à cache-cache pour développer sa curiosité et les mouvements oculaires (ils permettent à l’enfant, par un effet boule de neige, de rouler : les yeux bougent puis la tête puis le haut du corps et ainsi de suite).
- sur le ventre : des hochets disposés à distances variables pour qu’il essaie de tendre la main. Mon petit préféré : le miroir, afin que l’enfant puisse se voir et ériger sa tête. Il est possible d’acheter ou de fabriquer des dalles sensorielles aussi.
- à 4 pattes et sur les fesses : le tunnel ou des objets qui lui permettent de passer au-dessus ou au-dessous et de se cacher. Des coussins sous un tapis ou sous une couette pour former des petites montagnes afin de mobiliser ses 4 membres en même temps et ainsi travailler son agilité et sa stabilité.
- debout : disposer un tapis ou divers textiles au sol afin qu’il travaille son équilibre. L’idée ici est de proposer des parcours simples avec des objets à contourner, escalader, etc.
Enfin, à tout âge, les massages sont aussi un bon moyen d’aider votre enfant à prendre conscience de son corps. Vous pouvez, lors des massages, citer chaque partie que vous touchez. Une fois qu’il arrive à se tenir debout, il faut veiller à ne pas utiliser les chaussures avant que la marche soit bien acquise, afin de laisser le temps aux chevilles de se développer correctement. Les pieds nus, c’est souvent ce qu’il y a de mieux pour apprendre à marcher.
Prenez le temps et faites-lui confiance !
Dans tous les cas, pas d’inquiétude. Laissez votre enfant prendre son temps, écoutez-le, observez-le et surtout encouragez-le car c’est aussi grâce à vos mots qu’il gagnera en confiance et se sentira capable de se lever !
Si vous avez des questions, n'hésitez pas à en parler à votre pédiatre mais avant 18 mois il n’y a aucune inquiétude à avoir si votre enfant ne marche pas encore. Sauf cas particuliers, ils finissent tous par marcher tôt ou tard.
Et n'oubliez pas, que lorsqu’il sera debout, il faudra lui courir après et le suivre partout pour le surveiller.
Camille Yoka – Animatrice petite enfance
Juin 2025